Signalements à la DPJ : il existe des portes de sortie
Lettre ouverte par Élise Boyer, directrice générale, publiée le 3 octobre 2023. Récemment, un dossier de Katia Gagnon dans La Presse a révélé un terrible constat : près d’un enfant québécois sur cinq est signalé à la DPJ, un sur dix est pris en charge par les services sociaux et un sur vingt est placé hors de son milieu familial.
Les chiffres donnent froid dans le dos. Collectivement, on cherche des solutions. Pourtant, certaines sont à portée de main, comme le suivi Olo, qui est un accompagnement nutritionnel des femmes enceintes et des familles en situation de faible revenu par une intervenante de confiance. Le suivi Olo représente un actif incontournable pour apporter la santé aux bébés et aux familles du Québec. Sans lui, le portrait à la DPJ serait encore plus sombre. En misant sur lui, on peut faire mieux Le chercheur Tonino Esposito cité dans l’article parle « d’agir en intervention sociale comme on agit avec les patients atteints d’une maladie chronique dans un hôpital, avec un concept d’intervenant-pivot ». Il ajoute que « les services existent, mais qu’il faut avoir une réflexion sur l’accessibilité ». Le jour même, André Lebon, ancien vice-président de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse, allait plus loin au micro de Luc Ferrandez au 98,5 et lançait un appel à un réinvestissement dans les programmes de prévention.
« Les chiffres sont un signal, un baromètre d’une société malade dans lequel le filet social a des mailles de plus en plus distendues. […] C’est toute la collaboration autour, avant et au début de la vie qu’il faut investir. Tout ce qui peut être fait au bon moment et le plus tôt possible, c’est ça la priorité. »
Pour lui, le suivi Olo, tout comme les programmes SIPPE ou Agir tôt font partie d’une solution pour enrayer une surreprésentation des enfants en DPJ. Ce suivi Olo a plus d’une facette et c’est ce qui fait sa force. Les coupons échangeables contre des aliments apaisent l’insécurité alimentaire et apportent des nutriments essentiels au développement de l’enfant. Les outils soutenant les saines habitudes alimentaires aident à se cuisiner un avenir pour reprendre une expression et une démonstration de Patrick Lagacé. Enfin, l’accompagnement par une intervenante de confiance permet de nommer les barrières auxquelles font face les parents et de soutenir la motivation à les abaisser. La période des 1000 premiers jours est à la fois décisive pour le développement de l’enfant et une période de grande vulnérabilité pour plusieurs parents. Que ce soit dans le contexte du suivi Olo, du programme SIPPE ou de l’une des innombrables initiatives à succès du milieu commentaire (Dispensaire diététique de Montréal, Maison Bleue, Centre de ressources périnatales, OCF), l’écoute, le renforcement des capacités et l’accompagnement vers les services peuvent changer des trajectoires de vie. Comme M. Lebon, nous croyons en un système fort des arrimages entre les réseaux de la santé et communautaire qui assurent le développement harmonieux des enfants et l’adaptation des parents à leur rôle.
Investir dans la prévention Depuis plusieurs années, la Fondation Olo appelle à un réinvestissement dans le réseau pour permettre d’embaucher plus d’intervenantes et mieux les soutenir. En parallèle, les voix ne cessent de s’élever pour réclamer un financement adéquat du milieu communautaire. La prévention sera toujours un investissement, une certitude qui suppose néanmoins des sommes à débloquer. Nous avons calculé les chiffres avant la pandémie (il manque 11 millions par an pour le suivi Olo dans le réseau) et nous nous apprêtons à les répéter en même temps que nos ambitions : un suivi Olo accessible (tendre vers 100 % de familles admissibles rejointes au lieu du 60 % actuel), garant d’impact par ses pratiques et ancré dans sa communauté. Pour ajouter aux préoccupations, le contexte inflationniste fait grimper en même temps les besoins et le coût des aliments et la Fondation Olo voit son rayonnement bénéfique se rétrécir. Ne perdons jamais de vue que c’est en agissant en prévention pour diminuer des facteurs de risque et en favorisant les liens de confiance que nous construirons ce cercle de bienveillance que l’on veut pour nos enfants. Non, le suivi Olo ne sera jamais une porte d’entrée vers la DPJ. Par un financement adéquat, permettons qu’il remplisse ses multiples rôles : une porte d’entrée vers les services dont les familles ont besoin ET une porte de sortie pour briser un cycle d’inégalités qui enferme trop de familles.